Les contrats à terme perpétuels, ou « perpétuels », dominent aujourd’hui le trading de cryptomonnaies. Contrairement aux contrats à terme classiques, ils n’ont pas d’échéance. Ils permettent aux traders de spéculer sur le prix d’un actif sans jamais avoir à le livrer. Ce produit a été popularisé par BitMEX en 2016. Depuis, il s’est imposé sur toutes les grandes plateformes comme Binance, OKX ou Bybit.
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Ce succès repose sur une caractéristique clé : la possibilité de garder une position ouverte indéfiniment, avec effet de levier, tout en restant exposé au prix spot grâce à un mécanisme unique.
Contrats à terme perpétuels, le rôle central du financement
Pour que le prix du contrat perpétuel suive celui du marché spot, les plateformes utilisent un taux de financement, ou funding rate. Ce taux est échangé toutes les 8 heures, ou plus fréquemment selon la plateforme.
Quand le prix du perpétuel dépasse le spot, le taux est positif. Les longs paient les shorts. Quand il est inférieur, les shorts paient les longs. Ce système incite les traders à corriger les écarts.
Exemple : si BTC/USDT spot est à 65 000 $ et le contrat perpétuel est à 65 300 $, le taux de financement devient positif. Les acheteurs paient un taux à ceux qui vendent à découvert, jusqu’à ce que le prix converge.
Des taux très variables
Contrairement aux marchés traditionnels, les taux de financement crypto varient fortement. Ils peuvent rester stables autour de 0,01 % toutes les 8 heures, ou exploser à 0,25 % et plus en période de forte spéculation. Cela représente jusqu’à 2 % par jour de coût implicite pour les traders en position longue.
Sur certaines altcoins très volatiles comme PEPE ou DOGE, le funding rate peut même dépasser 1 % toutes les 8 heures dans des phases haussières extrêmes. Les marchés perpétuels deviennent alors des pompes à liquidité, attirant les arbitrageurs et liquidant les traders trop gourmands.
Stratégies et arbitrages
Les professionnels utilisent le taux de financement comme signal. Un funding rate très positif indique une euphorie haussière, souvent suivie d’un retournement. À l’inverse, un taux négatif prolongé sur un actif solide peut indiquer un point d’entrée.
D’autres pratiquent le basis trading. Ils ouvrent une position longue en spot et une position short en perpétuel. Si le taux est positif, ils capturent la différence en quasi sans risque. Ce type d’arbitrage est devenu courant chez les fonds crypto.
Certains protocoles DeFi tentent même de tokeniser ces stratégies via des produits automatisés qui captent les funding fees pour leurs utilisateurs.
Un outil à double tranchant
Les contrats perpétuels permettent de spéculer avec effet de levier jusqu’à x100. Mais ce levier implique un risque de liquidation rapide. Une variation de 1 % contre une position levier x50 peut tout effacer.
De nombreux crashs sur les marchés crypto ont été amplifiés par l’effet domino des liquidations sur les perpétuels. En 2021, plus de 10 milliards de dollars de positions levées ont été liquidées en 24 heures lors d’un flash crash.
Aujourd’hui, les plateformes gèrent mieux le risque avec des systèmes de auto-deleveraging et des assurances, mais la volatilité reste brutale.
Tendances récentes des contrats à terme perpétuels
Depuis 2023, de nouveaux produits perpétuels apparaissent sur des actifs plus exotiques : NFT, or tokenisé, actions synthétiques. Les volumes augmentent sur ces marchés ultra-spéculatifs.
Des plateformes décentralisées comme dYdX, GMX ou Hyperliquid attirent une part croissante des flux, avec des modèles sans carnet d’ordre et frais variables selon la demande.
Certains régulateurs commencent à s’y intéresser. La CFTC américaine a récemment intensifié sa surveillance des dérivés crypto. L’ESMA en Europe envisage des restrictions sur les produits à levier pour les particuliers.
Conclusion
Les contrats perpétuels sont au cœur de la liquidité et de la volatilité crypto. Le funding rate agit comme un thermomètre spéculatif. Bien utilisé, c’est un outil puissant. Mal maîtrisé, c’est une bombe à retardement. À mesure que les marchés mûrissent, ces instruments pourraient devenir plus régulés, mais leur nature reste profondément spéculative.